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Ce serait le mal professionnel du siècle. Identifié dans les années 70 et cantonné au départ à certains métiers bien précis, le burn out touche aujourd’hui un nombre important de Français, quelle que soit leur profession, leur statut ou leur entreprise. Les causes sont nombreuses et désormais bien connues. Les remèdes aussi.
Ex responsable RH dans une entreprise de distribution, Gaelle Roulland a été touchée de plein fouet par le burn out. Elle s’est aujourd’hui reconvertie en tant que coach et formatrice pour accompagner les victimes de burn out dans leur reconstruction et aider les entreprises à prévenir ce phénomène. Elle revient pour nous sur ce qu’est le syndrome d’épuisement professionnel et nous livre des clés pour l’identifier et surtout pour l’éviter.
C’est quoi le burn out ?
“Scientifiquement parlant, le burn out a été constaté dans les années 70 par les travaux du psychologue Herbert Freudenberger” nous explique Gaëlle Roulland. “À cette époque, il constatait une sorte de feu intérieur qui brûlait tout, laissant un immense vide chez certaines personnes.” D’où le nom de “burn out”, ou littéralement brûler de l’intérieur, se consumer.
Concrètement, le burn out, ou épuisement professionnel en français, est un épuisement physique, émotionnel et mental lié à la sphère professionnelle. On a souvent tendance à le confondre avec la dépression.
“Lorsque l’on est en dépression, on ne se sent pas bien tout le temps, dans tous les domaines de sa vie” nous explique la spécialiste, “tandis qu’en burn out, on ne se sent pas bien au travail, éventuellement un peu en dehors mais à cause du travail”. Cette distinction est importante car elle permet de poser le cadre, de comprendre que c’est la sphère professionnelle qui est à l’origine des symptômes.
Qui est touché par le burn out ?
“Autrefois, le burn out était cantonné à des métiers bien précis liés au domaine du médico-social. Mais on constate aujourd’hui que ça se généralise et peut toucher tous les professionnels, quel que soit leur statut : cadre, agent de maîtrise ou employé, ou leur secteur d’activité” analyse Gaëlle Roulland.
Selon elle, cela est dû principalement au style de management et à l’impact de la réduction du temps de travail qui a eu pour effet pervers pour les salariés de faire en 35h ce qu’ils faisaient en 39h avec une quête permanente de la productivité et de l’efficacité.
Ce ne sont pas les seuls ingrédients puisque le phénomène d’épuisement professionnel touche aussi les travailleurs indépendants qui, par principe, organisent eux-mêmes leur travail. “Les indépendants aiment ce qu’ils font. C’est quelque chose de très positif mais cela engendre aussi un investissement très fort de leur part” remarque la spécialiste. Et de préciser : “s’ils n’arrivent pas à le limiter ou à le cadrer, cela peut déborder, surtout lorsqu’il y a aussi la contrainte financière”.
Quelles sont les causes du burn out ?
Style de management, productivité, sur-investissement… Comme on a pu le voir, plusieurs causes peuvent être à l’origine d’un syndrome d’épuisement professionnel. Christina Maslach, psychologue américaine spécialisée dans les domaines de l’épuisement et du stress au travail, a identifié 6 facteurs pouvant mener au burn out :
- La surcharge de travail
- Le manque de contrôle sur ses activités
- Le manque de récompense
- Le manque de soutien social
- L’inégalité de traitement et le sentiment d’injustice
- Le conflit de valeur
La surcharge de travail, principale mais pas unique cause de burn out
Pour Gaëlle Roulland, “la surcharge de travail est souvent le premier facteur ou le principal facteur dans le burn out. On a trop de travail, trop de choses à faire mais pas assez de temps disponible pour le faire”. Cette situation génératrice de stress professionnel n’est toutefois pas suffisante à elle seule pour entraîner un épuisement professionnel. C’est un processus long et complexe qui fait intervenir d’autres facteurs.
L’implication excessive dans son travail
“Les personnes victimes de burn out sont systématiquement des personnes très impliquées dans leur travail” constate Gaëlle Roulland. Parfois, les exigences sont particulièrement fortes en matière de résultats alors que les moyens nécessaires pour y parvenir ne suivent pas (budget, moyens humains, outils). “Au final, on demande des choses impossibles mais comme ce sont des personnes impliquées, elles vont quand même essayer de le faire” note la spécialiste. On parle alors de qualité empêchée.
Autre effet particulièrement dévastateur chez les personnes impliquées : la perte de sens. “On arrive parfois à un stade où on se demande : à quoi bon ? Si demain je ne suis pas là, est-ce qu’on s’en rendrait compte ? On se retrouve souvent dans un environnement de travail où on nous demande plein de choses et pour lesquelles on ne voit pas l’utilité” remarque souvent Gaëlle Roulland lors de ses séances. La coach pointe notamment du doigt les trop nombreux reportings qui vont rajouter de la surcharge de travail, que personne ne va lire mais qu’il faut tout de même faire au risque de se faire taper sur les doigts.
Le rôle du management dans le burn out
La manière de manager est très importante, que ce soit le manager direct ou la culture de l’entreprise dans son ensemble. Selon Christina Maslach, 95% du burn out est dû à l’entreprise. “Le cœur du sujet, c’est le management” affirme même Gaëlle Roulland.
En première ligne, on retrouve le manager qui est garant de l’activité de son équipe au quotidien et qui peut être à l’origine d’inégalités de traitement ou du sentiment d’injustice. “Un problème de favoritisme dans l’équipe peut par exemple avoir des effets dévastateurs sur une personne très impliquée dans son travail” pointe Gaëlle.
Mais selon elle, tout ne repose pas toujours sur les épaules du manager. “Il peut lui aussi subir la situation et être en burn out lui-même” indique-t-elle. Dans ce cas, c’est la culture globale de l’entreprise qui est en cause et ce qu’elle attend de ses managers.
Comment détecter le burn out ?
“Le burn out est compliqué à détecter car on est souvent dans le déni” nous fait remarquer Gaëlle Roulland. “On ne veut pas le voir, même quand des proches nous le font remarquer. Quand on te dit “t’es pas comme avant”, il faut s’alerter”.
Les symptômes physiques constituent les alertes les plus classiques. Ils peuvent être très variés allant de la perte de mémoire à des problèmes de concentration en passant par des troubles digestifs ou des maladies à répétition. “Ils indiquent un stade avancé du burn out” alerte alors la spécialiste. Et de recommander : “il n’est pas trop tard pour agir mais il ne faut pas attendre ”.
Un élément doit toutefois nous alerter en tant que salarié ou manager : le cynisme. “Ce qui arrive aux autres ne nous touche plus. On est tellement empêtré dans notre burn out qu’on n’arrive plus à avoir d’empathie pour les autres” explique Gaëlle. “On est au bord du précipice et on peut finir à l’hôpital”. Il faut alors réagir très vite.
5 conseils aux managers pour prévenir le burn out
Rester régulièrement tard, ne pas prendre de pause, s’isoler, ne plus être enjoué, répondre à ses mails un dimanche ou pendant ses vacances sont autant de signaux qui doivent alerter un manager de potentiels risques psychosociaux.
Mais on l’a vu, un burn out reste difficile à détecter. Le mieux reste encore la prévention. Gaëlle Roulland nous glisse quelques conseils pour éviter les risques de burn out dans notre équipe.
- Savoir se remettre en question : en tant que manager, on doit s’interroger sur sa propre pratique du management
- Savoir faire la part des choses : le manager doit réussir à savoir quand filtrer les informations et la pression de l’entreprise, faire parfois le parapluie pour préserver son équipe.
- Être énormément à l’écoute de ses salariés : offrir une écoute pleine et entière à ses salariés, être aussi beaucoup dans l’observation pour détecter d’éventuels signes ou changements dans l’équipe ou chez les salariés.
- Savoir construire une relation de confiance avec son salarié
- Être exemplaire en tant que manager, sans pour autant être infaillible.
3 conseils aux entreprises pour prévenir le burn out
On l’a vu, une part importante du travail reste à mener au niveau de l’entreprise. “Un cas de burn-out est rarement isolé” constate Gaëlle Roulland. Plusieurs signaux doivent donc alerter les dirigeants mais aussi les représentants du personnel : des arrêts maladie plus fréquents, un turn over en hausse ou encore une ambiance de travail dégradée.
Gaëlle Roulland recommande 3 axes de travail pour prévenir le burn out dans les entreprises :
- Former tout le personnel, faire de la prévention auprès des partenaires sociaux, des salariés, des managers et du top management
- En parler même s’il n’y a pas de risque détecté, au même titre que la sécurité ou que les risques d’incendie par exemple
- Travailler sur la démarche QVT et les conditions de travail, sujets très liés aux risques psychosociaux et au burn out.
En conclusion, le burn out provoque un épuisement physique, émotionnel et mental lié à la sphère professionnelle. Ce syndrome est difficile à détecter car il peut avoir plusieurs causes, il peut toucher tout le monde et de façon très différente. N’oublions pas que le salarié n’en est pas le responsable mais la victime.
L’entreprise est responsable de la santé physique et mentale de ses salariés et de sa politique de management. Des actions peuvent être mises en œuvre tant du côté du manager que de celui de l’employeur pour prévenir les risques psychosociaux et les cas de burn out.