Retrouvez chaque mois dans votre boite de réception nos conseils et le meilleur de l'actualité RH.
Avec la crise du Covid-19, la gestion des congés payés s’annonce cet été comme un véritable casse-tête dans les entreprises. Nous faisons le point avec Matthieu Hue, avocat en droit du travail chez LexStep Avocats, pour savoir ce que salariés et employeurs peuvent ou doivent faire en cette période très particulière.
Une crise inédite avec un fort impact sur l’activité
La période de confinement a eu un impact important sur l’activité des entreprises. En France, plus de 10 millions de salariés se sont retrouvés en chômage partiel. Les congés, payés ou sans solde, et les RTT ont également servi à compenser la baisse d’activité. Les entreprises ont également massivement adopté le télétravail pour permettre la continuité de certaines activités tout en s’adaptant aux contraintes sanitaires. Enfin, les personnes vulnérables ou directement impactées par le virus ont pu bénéficier d’arrêts de travail pour maladie ou garde d’enfant.
Tous ces cas de figure, aussi exceptionnels soient-ils, sont de véritables casse-tête pour les dirigeants et les services RH qui doivent jongler entre un cadre réglementaire qui s’adapte à l’état d’urgence sanitaire, une gestion comptable pour le calcul des congés payés et les conditions de travail de leurs collaborateurs, notamment leurs contraintes familiales.
Que change l’état d’urgence sanitaire pour les congés payés ?
En temps normal, la période de prise des congés et l’ordre des départ sont fixés par un accord collectif (d’entreprise, d’établissement ou de branche) ou, à défaut, par l’employeur lui-même. Les congés payés annuels doivent nécessairement être pris dans une période légale comprise entre le 1er mai et le 31 octobre de chaque année.
Toutefois, l’employeur ne peut en aucun cas imposer à un salarié de prendre des congés payés qu’il n’aurait pas posés. A l’inverse, un salarié commettrait une faute en refusant de poser suffisamment de jours de congés payés alors que l’employeur le lui demanderait.
Une fois les congés payés fixés, l’employeur ne peut plus modifier l’ordre et les dates de départ moins d’un mois avant la date de départ prévue, sauf accord écrit du salarié et sauf circonstances exceptionnelles (notion appréciée au cas par cas les tribunaux).
En raison de l’état d’urgence sanitaire, l’ordonnance du n° 2020-233 du 25 mars 2020 a prévu la possibilité pour l’employeur d’imposer aux salariés la date de prise des congés payés et/ou de modifier unilatéralement les dates déjà posées, le tout dans la limite de 6 jours de congés. Cette possibilité nécessite toutefois la conclusion préalable d’un accord d’entreprise. Dans ce cadre, la période de congés imposée ou modifiée peut s’étendre jusqu’au 31 décembre 2020.
Quels sont les impacts d’une activité partielle ou d’arrêts maladie sur les congés payés ?
En principe, les absences pour maladie non professionnelle n’ouvrent pas droit à des congés payés, sauf dispositions conventionnelles contraires. Cependant, certaines entreprises ont négocié des dispositions conventionnelles contraires pour ouvrir les droits quel que soit le motif de l’absence dès lors qu’il est justifié par un arrêt de travail.
En cas d’activité partielle, la totalité des heures chômées est prise en compte pour le calcul de l’acquisition des droits à congés payés.
Comment gérer les congés payés acquis qui n’ont pas pu être posés avant le 31 mai ?
En raison de la crise sanitaire, certains salariés n’ont pas pu solder avant le 31 mai les congés payés qui étaient acquis. En principe, le report des jours de congés acquis mais non pris durant la période de prise des congés est possible, sous réserve d’un accord entre l’employeur et le salarié ou bien lorsqu’il s’agit d’un usage dans l’entreprise.
A défaut, les congés non pris au 31 mai sont perdus. Le salarié peut toutefois être indemnisé s’il prouve qu’il n’a pas pu poser ses congés en raison d’une faute de l’employeur. Attention : des accords collectifs peuvent aménager ces règles. Toutefois, dans ce cas, les congés payés ne peuvent pas être reportés au-delà du 31 décembre de l’année suivant celle pendant laquelle la période de prise de ces congés a débuté.
Qu’est-il prévu pour les salariés qui se retrouveraient sans mode de garde de leurs enfants pour l’été ?
La crise sanitaire a un impact non négligeable pour les salariés avec enfant à charge. Depuis le 2 juin 2020, les parents qui présentent une attestation de l’établissement d’accueil de leur enfant (crèche ou école) indiquant que l’établissement ne peut accueillir l’enfant, peuvent exiger d’être placés en activité partielle.
Ce principe ne s’applique toutefois qu’à l’accueil des enfants en crèches ou écoles. Il ne s’applique pas aux colonies de vacances ou aux centres aérés qui ne seraient pas en mesure d’accueillir l’enfant durant les vacances scolaires, dès lors qu’il s’agit d’activités de loisirs, non obligatoires. Il appartient donc aux parents de s’organiser.
La gestion des congés n’est toutefois pas seulement une question comptable et réglementaire mais aussi et avant tout une question humaine. Rien n’empêche les employeurs de faire preuve de souplesse et de compréhension en permettant à leurs salariés, compte tenu des circonstances, de télétravailler, de poser des congés payés ou des congés sans solde, voire d’aménager le temps de travail. Si la démarche est volontaire de la part des entreprises, elle permettra notamment de ménager le climat social qui peut être particulièrement tendu.
Dans tous les cas, il peut être intéressant de se faire accompagner par des experts RH pour aborder au mieux cette période délicats, notamment par un avocat pour obtenir des conseils en droit du travail.